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vendredi, avril 26, 2024

Exclusif. Victime de ses dirigeants inexpérimentés, les espagnols ont roulé Sonatrach dans la farine

Sonatrach, la compagnie nationale des hydrocarbures et véritable poumon économique du pays qui assure 98 % des recettes en devises du pays, paie cash l’inexpérience de ses dirigeants actuels et leur incompétence face aux problématiques les plus complexes des marchés internationaux de l’énergie.
Preuve en est, avec une vice-présidente chargée des activités de commercialisation, Fatiha Neffah, totalement novice dans ce secteur stratégique, Sonatrach est en train de se faire rouler dans la farine par la société espagnole  Naturgy Energy Group. Explications. 
Il faut savoir, d’abord, qu’entre la Sonatrach et Naturgy Energy Group, il y a un méga-contrat de livraison de plus de 9 milliards de mètres cubes (M3) par an. Le contrat était signé par Gas Natural Fenosa, l’ancienne appellation de Naturgy Energy Group, avec Sonatrach en juin 2018 et ce jusqu’en 2030.  Cet accord est très favorable en terme de prix pour Sonatrach au regard de la chute progressive des prix du gaz naturel sur le marché mondial à cause de l’explosion de l’exploitation du gaz de schiste américain.
Des explications s’imposent sur ce volet. Dans la première décennie 2000, les prix du gaz naturel ont connu des envolées spectaculaires qui avaient alors fait bondir l’opinion publique et la classe politique. Tandis que l’exploitation à grande échelle du gaz de schiste débute aux États-Unis, l’offre de ce gaz abonde le marché mondial du gaz naturel. Or, qui dit surplus de production dit chute des prix. Entre fin 2009 et mi-2012, les cours du gaz naturel sont divisés par deux…

Aux Etats-Unis, la nouvelle technologie a aidé l’industrie énergétique à dégager des quantités inégalées de gaz des gisements souterrains, principalement des schistes et sables bitumeux jugés jusqu’à présent inaccessibles ou non rentables. La production de gaz de schistes aux États-Unis s’est élevé à près de 8,6 milliers de milliards de pieds cubes en 2013, contre 360 milliards de pieds cubes en 2000. Suite à une augmentation de l’offre, le prix du gaz naturel produit aux États-Unis a chuté de 4,80 dollars des États-Unis par million de BTU en 2000 à environ 2,30 dollars des États-Unis en 2012. Le prix du gaz naturel aux États-Unis devrait est descendu en-dessous de 2 dollars des États-Unis en 2020.

L’Algérie, de son côté, a toujours négocié avec ses clients européens notamment les espagnols et les italiens des prix de vente qui tournent autour de 5 à 6 dollars par million de BTU. Avec la concurrence du gaz de schiste américain, elle s’est fixée une barre de 4 dollars par million de BTU pour rester rentable. C’est sur cette base qu’elle avait négocié son contrat avec Naturgy Energy Group en juin 2018.
Mais, aujourd’hui, cet accord a été unilatéralement piétiné par Naturgy qui pense pouvoir facilement embrouiller l’inexpérimentée, nouvelle Vice-Présidente de l’activité commercialisation de Sonatrach, Fatiha Neffah nommée et désignée dans ses fonctions le 30 mars dernier à la suite d’une décision qui a alimenté une très vive polémique sur la justesse de ce choix.
Il faut savoir effectivement que Neffah Fatiha n’a jamais dirigé de toute sa vie la moindre opération commerciale de grande envergure dans le secteur des hydrocarbures. Cette haut responsable de Sonatrach n’a jamais exercé au sein de la direction commerciale. Elle était auparavant la Vice-Président par intérim de la Direction Corporate Business Development & Marketing / SONATRACH, elle a travaillé également comme Directeur Projet/DG à la Direction DCP BDM Direction Générale SONATRACH ou à la Directeur de Division Développement Pétrochimie Activité Aval/ SONATRACH. Neffah Fatiha n’a aucune relation directe ou indirecte avec l’activité commerciale !
Le contrat de Sonatrach avec Naturgy Energy représente 45% de l’approvisionnement en gaz de l’Espagne et une source de revenus cruciale pour Sonatrach. La perte de ce contrat provoquera selon nos calculs une perte de plus de 360 millions de dollars par an pour Sonatrach.

Mais, au-delà de ces pertes financières, Sonatrach a été arnaquée par les espagnols qui ont abusé de sa faiblesse structurelle pour racheter 34% de parts supplémentaires dans la société Medgaz SPA, un gazoduc qui relie les installations algériennes de Béni Saf jusqu’au port d’Almería en Espagne en passant sous la mer Méditerranée. Ce rachat opéré en octobre 2019 a permis aux espagnols de s’imposer comme un actionnaire aussi puissant que Sonatrach et cet atout leur permet aujourd’hui de durcir le ton face à l’Algérie et de suspendre des contrats stratégiques sans prendre de gros risques politiques ou judiciaires.

En octobre 2019, Mubadala, le fonds souverain d’Abi Dhabi et actionnaire de contrôle de la société pétrolière et gazière espagnole CEPSA s’est désengagé de sa participation stratégique dans le capital de Medgaz SPA. Malicieusement, Naturgy a convaincu Sonatrach de la laisser monter en puissance au niveau capital de Medgaz et de passer de 14% à 49% des parts du pipeline stratégique.
Un accord de cession entre CEPSA et Naturgy a été signé le 14 octobre 2019 et la transaction est effective et définitive depuis le 2 mai 2020 !  Naturgy a berné ainsi Sonatrach et l’opération, évaluée à 445 millions d’euros, permet à Naturgy de transformer sa participation minoritaire de 14 % dans Medgaz en une participation stratégique qui lui ouvre aujourd’hui un boulevard pour contrôler l’un des gazoducs les plus importants de toute la Méditerranée puisqu’aujourd’hui, la compagnie espagnole dispose d’une minorité de blocage face à l’actionnaire majoritaire Sonatrach. Les espagnols sont aujourd’hui en mesure d’affronter Sonatrach et de se lancer dans un bras-de-fer sans risquer énormément de préjudice.
Sonatrach a fait preuve ainsi d’un amateurisme gigantesque en permettant à Naturgy Energy Group d’être aujourd’hui en position de force pour fermer les vannes de son contrat d’approvisionnement de gaz vu que les prix sont jugés, par les espagnols, trop favorables pour Sonatrach.
Ce scandale d’État risque de nuire aux relations diplomatiques entre l’Algérie et l’Espagne, surtout que Sonatrach possède 4% du capital de Naturgy Energy Group et représente son 4ème actionnaire, mais n’en est pas du tout traitée avec respect ! La Sonatrach s’est fait rouler dans la farine.
Cette participation boursière de Sonatrach n’est pas stratégique et elle est évaluée à 600 millions d’euros. Une cession de ces participations permettrait de procurer à Sonatrach une bouffée d’oxygène notamment en cette période où tous les clignotants sont au rouge. Il est que Sonatrach se réveille de  sa torpeur et reprenne son destin en main car il y va de l’avenir du secteur le plus stratégique pour l’économie algérienne
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