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vendredi, avril 26, 2024

Décryptage. Comment le projet de la nouvelle constitution limite dangereusement la liberté d’expression en Algérie

L’avant-projet de révision de la Constitution que veut appliquer la Présidence de la République en Algérie continue de restreindre largement la liberté d’expression et la liberté de la presse dans notre pays.

En effet, les modifications constitutionnelles de 2016 avaient conditionné la liberté des médias au « respect des constantes et des valeurs religieuses, morales et culturelles de la Nation », des notions vagues et excessivement larges ouvrant la porte à des interprétations arbitraires, ainsi qu’aux interprétations de la législation nationale. L’avant-projet affirme dans son article 52 que « la liberté d’expression est garantie » et dans son article 54 que la liberté de la presse ne doit être « restreinte par aucune forme de censure préalable ».

Cependant, cette disposition soumet cette liberté à de vastes restrictions en précisant que « le droit de publier des informations, des idées, des images et des opinions » doit se faire « dans le cadre de la loi », ce qui laisse toute latitude aux législateurs d’affaiblir l’essence de ce droit.

L’avant-projet conditionne par ailleurs toujours la liberté de la presse au « respect des constantes et des valeurs religieuses, morales et culturelles de la Nation ». L’article 55 garantit aux citoyen·ne·s le droit d’accès et d’obtention d’informations, mais à la condition que l’exercice de ce droit ne porte pas atteinte « à la vie privée, aux droits d’autrui, aux intérêts légitimes des entreprises et aux exigences de la sécurité nationale ».

Ces réserves laissent trop de latitude aux législateurs pour adopter des lois restreignant ce droit, sans exiger que les restrictions en question satisfassent aux trois conditions imposées par le droit international. En vertu du droit international, les restrictions aux droits humains doivent :

1. être expressément prévues par la loi ;

2. poursuivre un but légitime, comme le respect des droits ou de la réputation d’autrui, ou la protection de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé ou de la moralité publiques ;

Et 3) être nécessaires pour atteindre ce but légitime et proportionnelles à l’objectif recherché. Par exemple, la Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique, adoptée en 2002 par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, dispose que « toute restriction à la liberté d’expression doit être imposée par la loi, servir un objectif légitime et être nécessaire dans une société démocratique ». Elle ajoute que « la liberté d’expression ne devrait pas être restreinte pour des raisons d’ordre public ou de sécurité nationale, à moins qu’il n’existe un risque réel de menace imminente d’un intérêt légitime et un lien causal direct entre la menace et l’expression.

Dans son Observation générale n° 34 sur l’article 19 du PIDCP, le Comité des droits de l’homme a déclaré que la liberté d’expression ne pouvait faire l’objet de restrictions qu’à condition que celles-ci soient « fixées par la loi », imposées pour un motif légitime et conformes aux critères stricts de nécessité et de proportionnalité. Malheureusement, en Algérie, le pouvoir politique utilise la loi pour limiter la liberté d’expression au lieu de la protéger our les bien des citoyens.

 

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