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mercredi, avril 24, 2024

Une vision du développement : les bons résultats du Sénégal, le recul inquiétant de l’Algérie

Une vision du développement. C’est l’élément central qui permet à un pays d’amorcer un processus de développement. Sans une vision clairement définie et axée sur un plan d’action définissant les outils stratégiques permettant de réaliser de la croissance économique, aucun pays ne peut se placer sur les rails du développement. Une vision politique du développement est d’abord le fil conducteur, un cadre intégrateur, tant pour la réflexion que pour la pratique stratégique d’un Etat. L’exemple du Sénégal démontre parfaitement cette réalité en Afrique. Depuis l’édification du plan Sénégal émergent (PSE), ce pays africain a franchi avec réussite de nombreuses étapes de développement économique et social. 

Preuve en est, la Banque africaine de développement (https://www.AfDB.org/) a procédé à une évaluation de son intervention au Sénégal sur la période 2016-2020 et à la revue de la performance du portefeuille‑pays 2020.

Dans un rapport d’achèvement du « Document de stratégie pays » (DSP) couvrant la période 2016-2020, la Banque « analyse le contexte et les perspectives du Sénégal, évalue les progrès réalisés dans la mise en œuvre du DSP, présente la revue du portefeuille, tire les enseignements et identifie les domaines prioritaires pour la prochaine stratégie ».

Le DSP pour le Sénégal a été approuvé le 14 septembre 2016 par le Conseil d’administration de la Banque et reposait sur deux piliers à savoir : l’ « appui à la transformation agricole » ; et le « renforcement des infrastructures de soutien à la production et à la compétitivité », notamment l’énergie et les transports. Ce DSP en phase avec la Stratégie décennale de la Banque (2013-2022) et ses cinq grandes priorités opérationnelles, les « High 5 » s’aligne aussi sur les objectifs des cadres de développement du Sénégal, à savoir : le Plan Sénégal émergent (PSE) et son Plan d’actions prioritaires 2014-2018.

Ce rapport intègre également la revue de la performance du portefeuille (RPPP 2020). La revue à mi-parcours (RMP) adoptée en 2019 a maintenu les deux piliers et a jugé satisfaisante la performance du portefeuille. Faisant l’état des performances économiques du Sénégal depuis 2014, la Banque se félicite des énormes progrès obtenus mais relève également des défis et des facteurs de vulnérabilité auxquels le pays est confronté. Selon le rapport, le taux de croissance du Sénégal s’est accéléré de 3,4% sur la période 2008-2013 à 6,4% en moyenne sur la période 2014-2019. Le revenu national brut par tête a atteint 1 542 dollars américains en 2019 contre 1 353 dollars en 2015 et l’inégalité des revenus a baissé. Cependant l’endettement constitue un « défi » à relever avec une augmentation de la dette publique de 53% du PIB en 2014 à 64,2% en 2019, faisant ainsi passer le risque de surendettement de faible à modéré en lien avec un niveau élevé du service de la dette (30% des recettes publiques).

La survenue de la pandémie de Covid‑19 a affecté l’économie sénégalaise et « les perspectives jusque-là favorables sont désormais empreintes de grandes incertitudes. », souligne le rapport. La performance du portefeuille de la Banque est jugée satisfaisante, notamment avec un dépassement des objectifs initiaux. « La Banque a dépassé ses objectifs en termes d’approbation de projets sur la période du DSP (2016-2020). Un montant total de 1 108,63 millions d’UC a été approuvé pour un montant programmé de 1 045,32 millions d’UC ».

Par ailleurs, la Banque a pu mobiliser 1 085,6 millions d’UC de cofinancements. S’agissant du renforcement des connaissances, la Banque a mené plusieurs activités dans les secteurs de l’emploi, des hydrocarbures et du secteur privé. Les résultats obtenus dans la transformation agricole (pilier prioritaire) au cours de la période du DSP 2016-2020 font état de la production de 71 784 tonnes de riz blanc (119,6% de l’objectif), de la création de 300 entreprises agricoles sur 150 prévues et le lancement de la Zone de transformation agro-industrielle du Sud.

Le second pilier prioritaire a connu des « réalisations très encourageantes avec des avancées réelles ». Un taux de réalisation de 100% est attendu au niveau des quatre indicateurs de résultats ciblés dont deux ont été atteints en 2019 et deux autres susceptibles de l’être en fin 2020, souligne le rapport. Les interventions de la Banque ont contribué à maintenir en bon et moyen état 82% de routes revêtues, à augmenter le taux d’accès à l’électricité de 54% en 2015 à 76% en 2019. Au niveau régional, la construction et l’opérationnalisation en 2019 du pont sur le fleuve Gambie représente une avancée majeure dans l’intégration régionale et la fluidité du transport entre le Sénégal et la Gambie. En conséquence des résultats obtenus, la performance du portefeuille de la Banque au Sénégal est jugée satisfaisante.

Cela prouve ainsi l’importance de la planification dans le processus de développement d’un pays. La planification, l’élaboration d’un plan de développement, permet réellement d’aider les pays à déterminer leur vision, leurs valeurs et leurs objectifs en matière de développement économique, et les actions qu’ils doivent entreprendre pour atteindre leurs objectifs.

En Algérie, c’est justement l’absence de ce processus de planification qui empêche notre pays de progresser sur la voie de développement alors que les potentialités sont immenses et prometteuses. L’Algérie s’est régulièrement alignée sur les programmes mondiaux de développement tels que les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et les stratégies de réduction de la pauvreté. Ces programmes ont également influencé les priorités de développement de l’Algérie en mettant l’accent sur le développement social et l’éradication de l’extrême pauvreté. Cependant, l’Algérie n’a pas pu élaboré sa propre vision du futur  pour voir réaliser la transformation structurelle de son économie.  L’Algérie est restée encore au stade d’élaboration de sa vision d’une telle transformation. C’est ce qui fait la différence entre un pays comme la Sénégal qui réalise des avancées et l’Algérie qui régresse en dépit de ses richesses infinies.

Quelles sont concrètement les conséquences ? Faute d’une véritable vision de développement, l’Algérie n’a jamais pu se diversifier économique et elle a continué de souffrir de la baisse globale des prix du pétrole (comme le pétrole représente plus de 90% des exportations et 60% du revenu total) et la croissance économique est affectée par cette incertitude dans la gestion du pays. Depuis 2018, le gel des marchés publics ainsi que l’arrestation des dirigeants de grandes entreprises ont provoqué le non-paiement de factures, la planification de licenciements et une baisse de la confiance des investisseurs.

Le taux de croissance de 2019 était inférieur, à la fois aux prévisions précédentes du FMI et à l’objectif du gouvernement algérien de 4%. Le PIB algérien n’a augmenté que de 0,7 % en 2019, contre 1,4 % en 2018 . Les récentes politiques expansionnistes devraient soutenir la croissance dans les prochaines années, mais pourraient également accroître les déséquilibres macroéconomiques et modérer la croissance à moyen terme. Toutefois, selon les prévisions actualisées du FMI du 14 avril 2020, en raison de l’apparition du COVID-19, la croissance du PIB devrait tomber à -5,2 % en 2020 et en 2021, les incertitudes demeurent sur une éventuelle relance sous réserve de la reprise économique mondiale post-pandémique. L’Algérie est donc grippée et crispée car elle ne sait pas comment se projeter dans l’avenir et ne dispose d’aucune boussole pour se diriger dans le monde d’aujourd’hui.

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