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jeudi, mars 28, 2024

Révélations. Des équipements médicaux d’assistance respiratoire indispensables contre le Coronavirus bloqués depuis longtemps par les autorités algériennes

L’actuelle pénurie de certains équipements médicaux nécessaires et indispensables à la lutte contre le nouveau coronavirus a été provoquée par les très mauvaises décisions du ministère de la Santé et de ses diverses institutions, a appris Algérie Part au cours de ses investigations. Les consommables médicaux nécessaires à la mise en service des ECMO sont bloqués depuis… 2016 ! Il s’agit d’un véritable crime contre la santé publique car les ECMO sont recommandés massivement pour maintenir en vie les patients souffrant des symptômes les plus graves du COVID-19. Explications. 

Il faut savoir, d’abord, que l’oxygénation par membrane extracorporelle, communément appelée ECMO, désigne, en réanimation, une technique de circulation extracorporelle offrant une assistance à la fois cardiaque et respiratoire à des patients dont le cœur et/ou les poumons ne sont pas capable d’assurer un échange gazeux compatible avec la vie. Il s’agit d’une assistance qui peut être implantée par des abords vasculaires périphériques. Ce type d’assistance utilise le concept de circulation extracorporelle de sang dont la période moderne s’est ouverte avec l’utilisation des poumons artificiels à membrane. Le circuit de base est simple et comprend une pompe, un oxygénateur (permettant l’enrichissement du sang en oxygène et la décarboxylation) et des voies d’abord (une de drainage et une de réinjection). Sa mise en place est facile, rapide, et peut être initiée au lit du malade.

Les composants de l’ECMO sont des consommables médicaux très simples et disponibles dans de nombreux pays à travers le monde. Il s’agit de pompe,  Oxygénateur, Échangeur thermique, Canules ou Circuits préhéparinés.

Dans sa stratégie établie pour lutter contre l’infection au COVID-19, le ministère de la Santé algérien a préconisé le recours à l’ECMO en cas d’échec de la ventilation mécanique des respirateurs artificiels. Algérie Part avait révélé à ses lecteurs et lectrices le document intégral comprenant les recommandations et mesures de cette stratégie dessinée par le ministère de la Santé Algérien. Et voici la partie qui parle clairement de l’utilisation des ECMO :

Plusieurs médecins contactés par Algérie Part ont reconnu que les nombreux patients décédés suite à des détresses respiratoires aiguës causées par le COVID-19 auraient pu être pris en charge par l’ECMO si le consommable ( oxygenateur + pompe+tubing set+canules spécifiques)  nécessaire était disponible pour faire fonctionner les consoles ECMO déjà présentes dans les hôpitaux algériens. Il faut savoir que plusieurs établissements algériens de santé publique sont censés disposer de ces équipements nécessaires à l’utilisation de l’ECMO. Il s’agit notamment des CHU de Sétif, l’EHU d’Oran ou la Clinique médico-chirurgicale infantile (CMCI) de Bou Ismaïl (Tipaza), ainsi que l’Hôpital militaire d’AIN NAADJA.

Malheureusement, tous ces établissements souffrent de la pénurie des consommables médicaux indispensables au fonctionnement des ECMO, a-t-on confirmé au cours de nos investigations. Les consoles ECMO présentes au CHU de Sétif, à l’EHU d’Oran et au CMCI de Bousmail ne sont pas, malheureusement, opérationnelles en raison du manque cruel des kits comme les pompes ou les oxygénateurs, à savoir les dispositifs médicaux qui sont capables d’échanger de l’oxygène et du dioxyde de carbone dans le sang d’un patient humain au cours d’interventions chirurgicales.

Ces pénuries s’expliquent par les dysfonctionnements graves au sein de la direction de la pharmacie et de l’Agence nationale des produits pharmaceutiques (ANPP). Des dysfonctionnements qui peuvent, maintenant, voler des VIES aux patients algériens gravement touchés par le COVID-19.

Ces dysfonctionnements sont les lenteurs bureaucratiques et les pratiques de corruption qui minent les procédures délivrées par l’ANPP pour l’enregistrement des équipements médicaux ou des médicaments éligibles à la commercialisation sur le marché algérien.

Plusieurs opérateurs pharmaceutiques algériens et étrangers rencontrent des blocages intempestifs et à répétition dans l’octroi des PPI, à savoir les programmes prévisionnels d’importation des médicaments en Algérie, et de la complexité de la procédure au niveau de l’ANPP qui n’est pas conforme aux standards internationaux. Le manque de moyens de cette institution a conduit à des dates de RDV de dépôt de dossier tellement éloignées que cela obligent les partenaires mondiaux des opérateurs pharmaceutiques algériens à reconstituer plusieurs fois leurs dossiers administratifs.

Il faut savoir que votre média Algérie Part avait déjà dévoilé dans une précédente enquête les dessous dangereux des  Programmes Prévisionnels d’Importation communément appelés les (PPI) en Algérie. Nous avions expliqué que cette procédure suscite de vives inquiétudes parmi les professionnels du secteur de la santé en Algérie. Et pour cause, plusieurs sources concordantes ont assuré à Algérie Part que cette procédure a été utilisée par la direction de pharmacie hors des limites réglementaires et constitue un des principaux moyens pour bloquer certains opérateurs qui gênent l’expansion des situations monopolistiques détenues par certains importateurs privés ou représentants de laboratoires internationaux en Algérie.

Cette mauvaise gestion marquée par des dépassements dangereux et des pratiques de favoritisme avait empêché plusieurs opérateurs privés algériens de constituer un stock de sécurité pour les kits d’ECMO pouvant sauver aujourd’hui la vie de patients atteints d’insuffisance circulatoire aiguë ou de syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) comme celui causé par le COVID-19. Et ces blocages datent de jusqu’à 2016 pour certains opérateurs pharmaceutiques privés algériens !

Et pourtant, certains de ses opérateurs ont proposé depuis 2016 à nos hôpitaux des solutions innovantes de XENIOS, un géant mondial présent aux Etats-Unis, en Allemagne et en France, l’un des leaders de la conception des consoles ECMO,  qui permettent de prendre en charge tous les cas de figures et à tous les âges avec la même console en assurant une formation in-situ et dans un centre référent en Europe du personnel médical et paramédical de l’hôpital algérien qui en a fait l’acquisition.

Malheureusement, des blocages au niveau de l’ANPP ont empêché des établissements algériens comme le CMCI de BOU ISMAIL d’acquérir les kits pour ECMO en 2017 et 2018.

Il est à noter que ces dispositifs médicaux ont été ont été enregistrés au Ministère de la Santé par un opérateur privé dirigé par un médecin algérien établi en France. Le dossier réclamé par l’ANPP a été fourni en 2016: et les formulaires ont été légalisés à l’Ambassade d’Algérie en Allemagne. Une taxe de 600 000.00 DA (couvrant également les kits d’ECMO) a été payée en 2016 et 2017 et nous avons vérifié tous les documents qui le démontrent.

En dépit de tous ces aspects réglementaires qui ont été soigneusement respectés, les PPI –MEDOS (Deltastream ECMO) ont été délivrés très tardivement à l’opérateur algérien qui voulait introduire  en 2016/2017/2018 ces consoles ECMO.  Pis encore, aucune autorisation n’a été délivrée en 2019/2020. C’est ce qui explique qu’aujourd’hui, les établissements algériens sont totalement désarmés face à l’épidémie du COVID-19.

Force est de constater enfin que ces blocages absurdes ont mis en 2020 en danger la vie de nombreux patients algériens comme ceux pris en charge par le CMCI de BOU-ISMAIL et ceux atteints d’insuffisance circulatoire aiguë ou de syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) comme celui causé par le COVID-19. C’est dire que la mauvaise gouvernance du secteur de la santé est à l’origine de l’équipement très insuffisant de nos hôpitaux. Signalons en dernier lieu qu’à titre comparatif, le Maroc et la Tunisie ont plus d’ECMO que l’Algérie. En 2009, il y avait 107 consoles d’ECMO en France.

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