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samedi, avril 20, 2024

Pourquoi l’Algérie ne pourra pas récupérer facilement les biens et la fortune de la « Issaba » en France

La problématique de la récupération des biens et fortune des richissimes oligarques et hauts responsables du régime Bouteflika se pose avec acuité depuis plusieurs mois en Algérie. Il s’agit d’une procédure judiciaire très complexe et compliquée qui engage un processus, malheureusement, largement méconnu en Algérie. Explications. 

Le premier pays étranger vers lequel tous les regards algériens se tournent est bien entendu la France. Au regard de l’importance de la communauté algérienne dans ce pays européen et de l’intensité des liens humains entre les deux pays, plusieurs oligarques algériens ou de hauts responsables de l’Etat ont investi une partie de leur fortune dans les zones les plus chics des métropoles françaises notamment Paris ou la Côte d’Azur.

L’Algérie peut réclamer la saisie et la restitution de ces biens et avoirs financiers en se fondant  sur la convention d’entraide judiciaire en matière pénale franco-algérienne signée à Paris le 5 octobre 2016, particulièrement son article 15 qui prévoit expressément cette hypothèse.

Il faut savoir que cette convention est un instrument d’entraide moderne, qui contient des dispositions avancées sur ce type de thématiques : possibilité d’exécution d’une décision de confiscation étrangère, possibilité de restitution prioritaire à l’Etat requérant, possibilité d’accord de partage.

La France dispose également d’un arsenal juridique adapté, lui permettant avant jugement
d’identifier et saisir des comptes bancaires ou encore des immeubles situés en France à la
demande des autorités judiciaires algériennes, puis de confisquer ces biens après jugement en vue notamment de leur restitution. Il s’agit cependant de procédures extrêmement longues et complexes au plan juridique comme au plan pratique, a-t-on constaté au cours de nos investigations.

D’abord, ces procédures doivent en outre procéder d’une initiative des autorités judiciaires algériennes. Celles-ci doivent adresser une demande en ce sens à la France. Une initiative qui a été effectivement prise dans les dossiers de plusieurs oligarques déchus comme le dossier d’Ali Haddad où la justice algérienne a adressé officiellement depuis octobre 2019 une demande d’entraide et de coopération aux autorités judiciaires françaises afin d’identifier tous ses biens en France et de les saisir immédiatement comme il a été révélé amplement dans l’une des enquêtes d’Algérie Part.  

Il est à souligner que l’article 15 de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale franco-algérienne signée à Paris le 5 octobre 2016, prévoit notamment :
« 3. A la demande de la Partie requérante, la Partie requise peut exécuter, conformément à sa législation, une décision définitive de confiscation prononcée par les autorités judiciaires de la Partie requérante. 4. A la demande de la Partie requérante, la Partie requise doit, dans la mesure où sa législation le permet, envisager à titre prioritaire de restituer à celle-ci les produits et instruments des infractions, notamment en vue de l’indemnisation des victimes ou de la restitution au propriétaire légitime, sous réserve des droits des tiers de bonne foi. 5. Sauf si les Parties en décident autrement, la Partie requise peut déduire, le cas échéant, les dépenses raisonnables encourues pour les enquêtes, poursuites ou procédures judiciaires ayant abouti à la restitution ou à la disposition des biens confisqués en application du présent article. 6. Les Parties peuvent convenir, au cas par cas, de la disposition définitive des biens confisqués ou du partage du produit de la vente des biens confisqués. »

Qu’est-ce que cela signifie réellement ? 

Avant tout jugement, c’est-à-dire en cours d’enquête ou d’instruction, les autorités
judiciaires algériennes doivent adresser aux autorités judiciaires françaises des demandes
d’entraide pénale internationales afin de leur demander de prendre un certaines mesures
conservatoires visant des biens soupçonnés d’être mal acquis, et ce dans la perspective de
demander plus tard leur confiscation et leur restitution.

Ces demandes doivent notamment viser à identifier et geler des comptes bancaires, ou encore localiser et saisir des biens meubles ou immeubles. Ces mesures peuvent concerner les personnes poursuivies comme leurs proches ou d’autres personnes suspectées d’avoir un rôle d’intermédiaire dans les opérations, pour autant que leur implication ait été démontrée.

La législation française permet, par ailleurs, de cibler les biens dont les personnes poursuivies auraient « la libre disposition », sans pour autant que ces personnes soient les propriétaires effectifs de ces biens, et ce sous réserve des droits des « tiers de bonne foi ». Par ailleurs, les proches ou intermédiaires des personnes poursuivies initialement pourraient elles-mêmes se voir reprocher une infraction de blanchiment, dès lors que leur intervention avait pour objectif de masquer l’identité du propriétaire effectif du bien ou son origine frauduleuse.

L’Algérie dispose donc à sa guise de tout un arsenal juridique qui peut effectivement lui permettre de réclamer la saisie et la restitution des biens ou avoirs financiers obtenus par des détournements et des dilapidations financières commises en Algérie. Cependant, la confiscation de ces biens et de cet argent volé ou transféré illicitement vers la France ne peut pas intervenir si certaines conditions ne sont pas réunies.

D’abord, la confiscation doit avoir été prononcée par une juridiction algérienne. Ensuite, cette décision doit être définitive, c’est-à-dire que toutes les voies de recours (appel,
cassation) doivent avoir été épuisées, ce qui peut prendre parfois plusieurs mois voire
années. Et ces biens à confisquer doivent avoir été précisément identifiés et localisés. Il doit pouvoir être établi avec certitude que le financement de ces biens provient d’une activité illégale : en pratique, les auteurs de ces détournements ont en effet fréquemment recours à des intermédiaires et des montages juridiques complexes (sociétés écrans, prête-noms etc) afin de dissimuler l’origine des fonds détournés et leur destination.

C’est justement à ce niveau que la justice algérienne pèche par manque de rigueur et de professionnalisme. Les procès des oligarques algériens ont été bâclés hâtivement et les enquêtes judiciaires souffrent de plusieurs incohérences qui empêchent d’aboutir à la localisation et identification précise des biens mal-acquis en France ou ailleurs à travers le monde comme en Espagne ainsi qu’à Dubai ou en Suisse. L’amateurisme des services de sécurité en Algérie ont aggravé les irrégularités des enquêtes judiciaires portant ainsi un préjudice énorme à la crédibilité des démarches judiciaires entamées par l’Algérie pour récupérer ces biens et fortunes constituées à l’étranger à travers des mécanismes de blanchiment d’argent lancés depuis l’Algérie.

Il est à noter enfin que compte tenu du contexte dans lequel ces demandes de restitution des biens mal-acquis par les oligarques algériens en France pourraient être présentées par les autorités judiciaires algériennes, la question d’un refus d’exécution au motif que la demande se rapporte à des infractions politiques ou connexes à des infractions politiques, motif de refus expressément prévu par l’article 3 de la convention franco-algérienne et repris à l’article 713-37 du code de procédure pénale, pourrait éventuellement se poser. Ce qui empêcherait toute confiscation des biens composant les fortunes en France des oligarques algériens déchus.

 

 

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7 تعليقات

  1. La France ne va jamais permettre à une justice Algérienne libre et indépendante de récupérer les biens du peuple Algérien volé par les Algériens qui été en poste en Algerie. La France a aidé ces criminels, voleurs et traîtres de transférer l’argent du vol, corruptions et détournement de l’Algerie vers la France. La france a aidé ces milliers de criminels à ouvrir des comptes en banque et de blanchir l’argent volé, a avoir des résidences et même des passeports.
    La france son seul but et de détruire l’Algerie, le fait que l’ambassadeur de france en Algérie est à chaque fois propulsé chef des services de sécurités en france est un des paramètres visibles du processus de vitrification de l’Algerie par la France.

  2. Les autorités algériennes savent très bien qui a des avoirs en France: la plupart des gens au pouvoir depuis 1962 a détourné de l’argent pour investir en France. S’ils commencent à arrêter des responsables présents/passés qui ont investi à l’étranger: ça ne s’arrêtera plus!! C’est comme la concorde civile de Bouteflika, y’a eu tellement d’assassins/violeurs/voleurs chez les islamistes qu’on a préféré arrêter personne. Et la boucle est bouclée: les islamistes amnistiés, et ensuite le FLN/ANP. Circulez y’a rien à voir! Qui peut sérieusement croire à cette justice/règlements de comptes quand la plupart des voleurs et leurs enfants se baladent tranquillement???
    Dans le système FLN/ANP tout le monde en a profité, certains plus que d’autres c’est tout

  3. À ceci près que les assassins, violeurs, tueurs…l’étaient avec l’assentiment de l’état.
    Cette stratégie de la terreur était ordonnée depuis l’extérieur avec ses complices dans les hautes sphères de l’état.
    Aujourd’hui, on attend juste qu’elles décèdent pour rétablir partiellement et officiellement la vérité.
    Bled Mickey .

  4. @Ahmed,
    Je sait que je dérange avec certaines de mes interventions. Elles sont pertinentes et ont de la substance. Qu’est-ce qui dérange de faire le liens entre le poste d’ambassadeur français en Algerie qui est un avant poste pour devenir chefs des services de sécurité française avec tous ce que cela sous-entend! Espions, terrorisme, détournement, corruption, blanchiment de l’argent détourné, l’argent de la corruption etc. Eh bien tous cela est planifiée, géré, exécuté et développé dans les très hautes sphères de l’état français.