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mercredi, avril 24, 2024

L’Etat algérien réduit de 50% son budget de fonctionnement 2020 : Encore une annonce qui ne pourra jamais être concrétisée

Encore une annonce totalement déconnectée de la réalité. Au début de ce mois de mai, la Présidence de la République a promis que l’Etat réduirait désormais de moitié son budget de fonctionnement 2020. La mesure s’inscrit dans le cadre du plan de lutte contre les conséquences économiques du covid-19.

« Le Conseil des ministres a décidé, après un débat de l’exposé présenté par le ministre des Finances relatif à l’avant-projet de Loi de finances complémentaire (LFC) pour l’exercice en cours, l’augmentation de 30 à 50% la réduction du budget de fonctionnement. Cette réduction comprend les dépenses de l’Etat et de ses institutions », avait indiqué un communiqué de la présidence algérienne, relayée par l’APS, l’agence d’information de l’Etat. Or, il s’agit d’une mesure qui ne pourra jamais être concrétisée. Nos explications.

Il faut savoir, d’abord, que le Projet de la Loi de Finances Complémentaires (LFC) 2020 a prévu la baisse des dépenses budgétaires à 7.372,7 milliards de dinars contre 7.823,1 milliards de dinars dans la Loi de finances (LF) initiale. C’est-à-dire qu’au lieu de dépenser l’équivalent de 60,85 milliards de dollars, l’Etat algérien dépensera en 2020 l’équivalent de 57,34 milliards de dollars. Soit une baisse d’à peine 3 milliards de dollars.

Il s’agit-là de toutes les dépenses budgétaires de l’Algérie en 2020. Maintenant, regardons ensemble le budget de fonctionnement qui représente une partie des dépenses budgétaires de l’Algérie. Ce budget est fixé à 4.893,44 milliards de Da, à savoir l’équivalent de 38,06 milliards de dollars. C’est ce budget que la Présidence de la République a promis de réduire de 50 % pour réduire l’impact financier et économique de l’épidémie du COVID-19 sur les équilibres du pays.

Malheureusement, ce budget est difficilement compressible et on ne pourra pas le baisser de 50 %. Pourquoi ? Parce que 59 % de ce budget relève de la masse salariale de ses fonctionnaires algériens. Le reste, ce sont les transferts sociaux et les organes de soutien à l’emploi à hauteur de 24 %. En clair, si la Présidence algérienne veut réduire le budget de fonctionnement de l’Etat jusqu’à 50 %, elle doit procéder au licenciement d’une partie des 2,5 millions de fonctionnaires algériens. Ou du moins à une réduction substantielle de leurs salaires. Ce qui est, d’ailleurs, impossible puisque cela affectera les équilibres sociaux du pays. En réalité, la Présidence n’a jamais parlé ou réfléchi sur la mise en place d’un plan de licenciement des salariés de la fonction publique comme elle n’a étudié aucun dispositif permettant de réduire leurs salaires.

Les effectifs de la Fonction publique ne cessent d’augmenter d’une année à une autre. Et en raison de l’existence de plusieurs dispositifs de recrutements, le nombre réel des fonctionnaires algériens dépasse les 2,8 millions de personnes et pourrait même dépasser les 3,2 millions de personnes. Pourquoi ?

Parce que la Caisse Nationale des assurances sociales (CNAS) comptabilisent chaque année de nouveaux fonctionnaires  y compris ceux recrutés dans le cadre du pré-emploi. Il s’agit également des employés occupant des postes administratifs au sein d’entreprises relevant du secteur privé. Or, selon la Direction générale de la Fonction publique, est reconnu fontionnaire «toute personne qui répond au critère de l’article 4 qui définit la relation statutaire entre un employé et son employeur étatique relevant du secteur de la Fonction publique». Ainsi, l’article stipule «qu’il est fonctionnaire l’agent qui, nommé dans un emploi public, a été titularisé dans un grade de la hiérarchie administrative. La titularisation est l’acte par lequel le fonctionnaire est confirmé dans son grade». Il est à rappeler, par ailleurs que, les fonctionnaires recrutés dans le cadre du pré-emploi ne sont pas comptabilisés au sein du fichier de la DGFP.

Ce dysfonctionnement aggrave les dépenses de l’Etat algérien et coûte encore plus cher à l’Algérie. Dans ces conditions, si la Présidence touche pas aux salaires des fonctionnaires ou ne réduit pas leur nombre, l’application de la fameuse réduction du budget de fonctionnement est totalement impossible.

Le directeur général du Budget, Faïd Abdelaziz, reconnaît à demi-mot cette vérité. D’ailleurs, devant les membres de la commission des finances du parlement algérien, Faid Abdelaziz a affirmé que, pour l’heure, une seule coupe de 141 milliards Da, à savoir à peine 1,1 milliard de dollars, a été opérée dans le cadre de la réduction du budget de fonctionnement de l’Etat dans le cadre du projet de loi de Finances 2020 (PLFC 2020).

« Les ministères ont fait des propositions pour la réalisation d’économies qui ont été retenues, et ce, sans pression afin de leur accorder toujours une marge de manœuvre au niveau de leurs activités », a précisé encore à ce sujet le DG du Budget qui a reconnu ouvertement la difficulté de compresser les dépenses de fonctionnement à cause des 59% de cette masse monétaire dédiée aux salaires des fonctionnaires algériens.

Selon lui, en ôtant le coût des transferts, des subventions et du dispositif pour l’emploi, le reste du budget de fonctionnement s’établit à près de 500 milliards Da,  savoir à peine 3,89 de milliards dollars. Une somme dérisoire qui ne pourra pas constituer des économies substantielles pour l’Algérie si elle vient de les supprimer en ces temps de crise financière et d’épidémie du COVID-19.

Tebboune et son gouvernement se sont encore une fois gourés.

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