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jeudi, mars 28, 2024

Le câble Orval (Oran-Valence), l’histoire sombre d’un méga-projet qui va provoquer un nouveau scandale de corruption

C’est un projet stratégique qui devait augmenter le débit de l’Internet en Algérie et démocratiser encore davantage l’accès au Web au profit de tous les Algériens. Orval est le nouveau câble sous-marin qui devait relier Valence en Espagne à Oran dans le but de connecter les deux pays à partir des stations d’atterrissement d’Oran, d’Alger et de Valence, et il viendra ainsi renforcer les capacités télécoms à haut débit de l’Algérie. Le 5 décembre 2019, l’ex-ministre algérienne de la Poste, des Télécommunications, des Technologies et du Numérique, Houda-Imane Faraoun (photo), a procédé à l’inauguration du système de câble sous-marin à fibre optique reliant l’Algérie à l’Espagne. Mais dans la réalité, ce projet soulève de nombreuses interrogations et suscite des doutes. 

En effet, nous avons pu constater au cours de nos investigations que la mise en service de ce câble n’est pas encore effective alors qu’une cérémonie officielle a été organisée le 5 décembre 2019 pour annoncer la fin des travaux de sa réalisation. En plus, pour l’heure, aucune instance officielle algérienne n’a communiqué la moindre donnée vérifiable sur l’impact de ce nouveau câble sur le trafic internet en Algérie.

Par ailleurs, ce projet a été géré dans une grande opacité et après le limogeage de Houda-Imane Faraoun, les langues commencent à se délier au sein d’Algérie Télécom. D’abord, aucun contrôle transparent n’a été exercé pour superviser la gestion des budgets alloués à la réalisation de ce câble sous-marin, initié en 200 et d’une longueur de près de 550 km. Officiellement, le coût global de ce projet, dont les travaux se sont étalés sur une période dépassant les 14 mois, période initiale de réalisation de ce câble, est estimé à 36 millions d’euros (26 millions pour le projet Oran-Valence et 10 millions pour celui d’Alger-Valence. Il s’agit des fonds propres du groupe d’Algérie Télécom et aucun prêt n’a été contracté pour financer ce projet.

Il s’avère, selon plusieurs sources concordantes interrogés par nos soins, que ce budget a été largement dépassé. Mais là, encore ni le ministère des TICS ni le Groupe Algérie Télécom n’a rendu des comptes ou dévoilé des bilans à propos de la gestion financière de ce projet financé par l’argent public des Algériens.

D’autre part, le projet de ce câble sous-marin a suscité des dépenses onéreuses et intrigantes qui suscitent de nombreux doutes. Pour les besoins de gestion de ce projet, Algérie Télécom a lancé une filiale en Espagne à Valence, à savoir Algérie Télécom Europe (ATE). C’est pratiquement la seule entreprise de droit européen, constituée exclusivement de capitaux publics algériens excepté Sonatrach dans le secteur des hydrocarbures. Créée en avril 2016, Algérie Télécom Europe SA (ATE) s’est offert un beau siège qui est implanté à Valence en Espagne et qui a été inauguré aussi au cours du mois de décembre 2019. Pour ce siège digne des grandes entreprises du secteur, situé au cœur de la ville de Valence, Algérie Télécom dépensé plus d’un million d’euros, a-t-on appris de plusieurs sources concordantes. Cet investissement public a-t-il été justifié par une stratégie de management ou des considérations économiques clairement définies ? Il faut savoir que la société publique Algérie Télécom est, jusqu’à 2013, une entreprise totalement déficitaire et ne dégage aucune rentabilité. À partir de 2013, c’est l’Etat algérien qui est intervenu pour éviter à Algérie Télécom une véritable faillite grâce à un financement à taux bonifié de 115 milliards de dinars (environ 1,4 milliard de dollars) pour la mise à niveau de ses infrastructures. Sur ce montant, 48 milliards de Da ont été consacrés au financement du plan d’investissement de 2013. Grâce à ce prêt du Trésor Public de l’Etat, Algérie Télécom a remonté un petit peu la pente et arrive à dégager un résultat financer modeste de 12,7 milliards de Da pour un chiffre d’affaires de 100 milliards Da en 2019.

Dans plusieurs régions du pays, elle enregistre des ventes à pertes et ses prestations suscitent la colère des usagers algériens. Incapable donc de satisfaire les besoins du marché national, Algérie Télécom s’est implantée en Espagne en débloquant rien que pour son siège à Valence un budget dépassant les 1 million d’euros et encore une fois, aucun bilan ni la moindre étude de marches sérieuse n’a été réalisée ou dévoilée pour justifier ces dépenses publiques.

Il est à souligner également que le projet d’Algérie Télécom en Espagne a servi d’alibi à ses dirigeants pour effectuer de très nombreux voyages dans ce pays européen aux frais de la princesse. Preuve en est, le PDG du groupe Algérie Télécom, Ahmed Choudar, a effectué plus de 40 voyages à Valence entre 2018 et 2019. Des voyages financés par l’argent public de l’entreprise et en devises sonnantes et trébuchantes. Des voyages réservés uniquement à Ahmed Choudar et certains de ses acolytes alors que le premier manager du groupe Algérie Télécom avait beaucoup de travail et de missions à accomplir en Algérie. Toutes ces pratiques soulèvent les interrogations les plus légitimes sur la gestion opaque des investissements espagnols du groupe Algérie Télécom. Plusieurs cadres promettent de monter au créneau et se disent prêts et disposés à collaborer avec les services de sécurité pour ouvrir une enquête sur ce dossier méconnu de l’opinion publique.

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