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jeudi, avril 18, 2024

Exclusif. Navigation aérienne dans les aéroports algériens : des dizaines de millions d’euros gaspillés pour acquérir une technologie dépassée

Depuis 2017, les autorités internationales de l’aviation civile à travers leurs organismes chargés des services de la navigation aérienne (ANSP) précisément européennes, asiatiques et américaines ont mis progressivement en œuvre un nouveau programme portant sur le démantèlement et le non-renouvèlement de leurs systèmes de surveillance RADAR pour les remplacer par de nouveaux systèmes appelés les systèmes de surveillance ADS-B « Automatic Dependent Surveillance-Broadcast ». Il s’agit d’une technologie qui permet aux contrôleurs de la circulation aérienne d’observer le trafic aérien avec une précision inégalée jusque-là au lieu de s’appuyer sur la technologie Radar considérée comme vieille de plusieurs décennies. 

Dans ce même contexte, les industriels des systèmes de surveillance de la navigation aérienne ont pu associer le mode S à l’ADS-B avec un transpondeur, un appareil automatique qui reçoit, amplifie et retransmet des signaux sur des fréquences différentes,  conçu pour déterminer la position, l’attitude, l’immatriculation, les infos sur le type d’avion et sa plage de vitesse au système de surveillance l’’ADS-B afin de permettre aux contrôleurs et aux pilotes de bénéficier de services semblables à ceux qui sont rendus par un RADAR primaire ou secondaire, mais sans que l’usage de ces derniers ne soit nécessaire.

Il faut savoir, en outre, que chaque RADAR ne peut couvrir qu’une zone limitée de quelques centaines de KM, ce qui implique à l’Etat à travers ses opérateurs des services de la navigation aérienne d’installer de nombreuses stations RADAR pour obtenir une couverture entière et assurer un contrôle aérien satisfaisant de son territoire.

Or, chaque installation représente un énorme investissement en matière de coût qui varie entre 1 et 4 millions de dollars USD pour une seule station de Radars alors qu’une station-relais ADS-B coûte entre 100 000 et 400 000 dollars USD soit dix fois moins cher qu’une station Radar.

Selon les plus récentes notifications transmises par des experts de l’organisation international de l’aviation civile (ICAO), la technologie ADS-B ne nécessite aucune infrastructure comme la construction d’une Tour Radar, ni la présence de personnel qualifié en présence continue, une solution rentable qui permettra à l’organisme chargé des services de la navigation aérienne d’avoir une couverture générale et une surveillance presque totale de l’espace aérien d’un territoire déterminé à un coût moindre. Ce qui permettra aux autorités de l’aviation civile des Etats d’économiser leurs dépenses et investir leurs entrées en redevances pour d’autres travaux renforçant la sécurité aérienne du pays.

Toutefois, en dépit de toutes les recommandations des instances de l’ICAO, depuis 2018, l’organisme gouvernemental chargé des services de la navigation aérienne en Algérie, à savoir l’Établissement national de la navigation aérienne (ENNA), avait signé le contrat référencé 1666/dl/2018 PDEGEA avec le groupe Espagnol INDRA. Il s’agit d’un projet qui a coûté aux caisses de l’Etat algérien plus de 50 millions d’Euros. Ce marché est étalé sur une durée de 18 mois et il est composé de plusieurs lots.

Concernant le lot surveillance de ce contrat gigantesque, l’ENNA a commandé 04 radars primaires PSR mode S pour les aéroports d’Alger, Hassi Messaoud, Constantine, Oran et 09 autres stations radars secondaires SSR mode S pour les sites de Bou Saâda, Tiaret, Hassi Messaoud, Ain Salah, Constantine, Ghardaïa, Tamanrasset et Djanet pour le montant de près de 21 millions d’Euros.

Ce marché a été considéré comme une véritable aubaine pour l’opérateur espagnol INDRA dans la mesure où il lui permet de liquider ses stocks de radars qui subissaient les moisissures dans les hangars puisque de nombreux pays dans le monde entier ont décidé de passer au système beaucoup plus performant de l’ADS-B.

Pour de nombreux experts et connaisseurs de la sécurité aérienne consultés par Algérie Part, les mauvais choix de l’ENNA traduisent l’incompétence de ses hauts responsables et dévoilent des intentions malsaines qui consistent à privilégier certains fournisseurs étrangers proches de leurs intérêts mercantiles au détriment de l’intérêt général du pays. L’ENNA aurait été mieux inspirée de suivre la tendance mondiale et de s’adapter aux mutations technologique en optant pour le nouveau système de surveillance de navigation aérienne prônée par les multiples expertises  de l’ICAO.

Au lieu, des dizaines de millions d’euros et de dollars USD ont été dilapidés pour acquérir une vieille technologie aujourd’hui dépassée et désuète. Ce scandale est passé sous silence par la direction de l’ENNA et le ministère des Transports ainsi que le gouvernement qui laissent faire ces pratiques inconscientes et dangereuses pour la sécurité aérienne du pays.

Celle-ci procède de l’ensemble des mesures visant à réduire le risque aérien. L’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) édicte des normes et des recommandations applicables dans les pays signataires de la convention de Chicago. Par exemple, l’annexe 10 de l’OACI définit les normes et recommandations applicables aux radiocommunications aéronautiques.

Soulignons enfin que l’ENNA est une société publique quasiment méconnue en Algérie. Et pourtant, cette grosse entreprise publique est parmi l’un des premiers établissements stratégiques de l’Etat algérien. C’est l’organisme qui est chargé  de l’exploitation et de la sécurité du transport aérien algérien.  Une mission très délicate qui engage la sécurité nationale et la souveraineté de tout notre pays. L’ENNA est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) placé sous la tutelle du ministère des Transports algériens. Et en tant qu’EPIC, il doit gérer des fonds très conséquents et de nombreux marchés aux montants faramineux. De l’exploitation technique des aérodromes jusqu’à la réglementation de la circulation aérienne en passant par la sécurité de la navigation aérienne dans l’espace aérien algérien, le travail de l’ENNA lui permet de gérer des budgets de plusieurs Milliards de Da et de plusieurs Millions d’Euros et de Dollars. Algérie Part a publié de nombreuses enquêtes sur les dessous de la gestion douteuse de l’ENNA.

Algérie Part est le seul média algérien qui ose enquêter à chaque fois sur les pratiques et gestion de l’ENNA. Nous avons publié de nombreuses enquêtes et des révélations appuyées par de nombreux documents démontrant des anomalies et des irrégularités qui devraient interpeller les pouvoirs publics. Malheureusement, les autorités algériennes chargées de surveiller cette importante entreprise publique n’ont jamais voulu réagir en sévissant contre ces pratiques immorales et illégales dénoncées par nos publications.

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