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vendredi, avril 19, 2024

COVID-19 : l’Algérie, l’un des rares pays qui ne donne aucune aide financière aux travailleurs touchés par la crise

Inédit. Dans le monde entier, les autorités « bougent » pour trouver des aides aux travailleurs de leurs entreprises qui ont été gravement impactées par les conséquences socio-économiques de la pandémie du COVID-19. Mais en Algérie, en dépit de la démobilisation d’au moins 50 % des 7 millions de salariés du secteur privé et de 50 % des 4 millions de travailleurs du secteur public, l’Etat n’a envisagé aucune aide financière pour venir en aide à ces travailleurs qui n’ont pas repris leur travail depuis la fin du mois de mars dernier. 

En effet, tous ces travailleurs algériens ont été placés en congé exceptionnel pour les protéger contre les risques de l’épidémie du COVID-19. Officiellement, cette mesure du congé exceptionnel a été levée officiellement par l’Etat algérien depuis le 14 juin dernier.

Ceci dit, cette levée du congé exceptionnel ne concerne que « les entreprises qui peuvent assurer le transport de leur personnel, et satisfaire les conditions de protection sanitaire propres à leur activité », a expliqué un communiqué des services du Premier ministre a été rendu public samedi 13 juin 2020. Ce qui n’est, malheureusement, pas le cas de tous les salariés algériens qui travaillent dans des entreprises ne pouvant pas leur assurer la continuité des transports. De ce fait, plusieurs millions de travailleurs algériens seront contraints de rester chez eux comme ils le font depuis le 7 avril dernier, date à laquelle la mise en congé exceptionnelle a été officiellement décidée par les autorités algériennes.

Or, ce congé exceptionnel ne sera pas payé pour la majorité des travailleurs et travailleuses en Algérie ! Oui, les employés algériens, concernés par le congé exceptionnel rémunéré, ont été invités à prendre leurs reliquats et leurs congés annuels. C’est du moins ce qu’a expliqué l’inspection générale du Travail (IGT) dans une correspondance adressée, le 17 juin dernier, aux inspecteurs régionaux du Travail. «Conformément aux instructions de monsieur le ministre du Travail, je vous demande de convoquer l’ensemble des employés dépendant de vos services à rejoindre leurs postes du travail, y compris les femmes concernées par le congé exceptionnel. Celles-ci doivent consommer, dans un premier temps, leurs reliquats et leurs annuel, avant de bénéficier du congé exceptionnel », précise l’IGT dans sa correspondance.

Même l’instruction du Premier-ministre datant du 13 juin obligent « les administrations » à  « veiller à l’apurement des reliquats de congé de leurs effectifs et à l’ouverture de la période des départs en congé au titre de l’année en cours ». Qui va donc bénéficier du congé exceptionnel rémunéré ? Les travailleurs ou travailleuses qui n’ont plus de reliquats à consommer ? Le flou demeure entier.

Mais au-delà de cet incroyable imbroglio autour de la rémunération du congé exceptionnel, il convient de noter que l’Algérie n’offre quasiment aucune aide économique ou financière aux salariés pénalisés par les conséquences de la pandémie du COVID-19. Et pourtant, dans des pays beaucoup moins riches que l’Algérie, les salariés bénéficient d’une aide financière pour leur permettre de surmonter la précarité provoquée par la pandémie du COVID-19.

A titre d’exemple, en Tunisie, un pays en crise financière et dont la dette extérieure a dépassé les 25 milliards d’euros en février 2020, depuis le 14 mai dernier, 3577 sociétés employant environ 146 mille travailleurs ont bénéficié d’aides sociales exceptionnelles mobilisées par le gouvernement tunisien. Et ce, pour aider les entreprises à surmonter les conséquences de la crise sanitaire. Le gouvernement tunisien a même mobilisé une enveloppe de près de 100 millions d’euros pour aider les entreprises en difficulté.

Chaque salarié tunisien a touché une prime de 200 Dinars tunisiens, à savoir l’équivalent de près de 63 euros pour pouvoir tenir face aux conséquences socio-économiques du COVID-19. Malgré son endettement, la Tunisie a fait un geste honorable à l’égard de ses salariés. En Algérie, le pays qui prétend disposer de réserves de changes et de pétrodollars, aucun dinar n’a été versé aux salariés algériens durement frappés par la paralysie économique et financière du pays à cause de la pandémie du COVID-19.

Au Maroc, notre voisin de l’ouest, depuis le 9 mai dernier, quelque 950.000 salariés impactés par la crise induite par la pandémie du nouveau coronavirus ont touché une indemnité forfaitaire au titre du mois d’avril. Ces salariés de 134.000 entreprises ont perçu une aide de 2.000 dirhams (190 euros).

Le Maroc a même pensé aux 4,3 millions de familles tirant leurs revenus du secteur informel ou de métiers précaires. Depuis la fin du mois de mars dernier, 3,7 millions ont bénéficié d’une aide directe imaginée et élaborée le comité de veille économique mis en place dés le début de l’épidémie du COVID-19 au niveau du Ministère de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’Administration. Ce comité est chargé d’une part, de suivre de près l’évolution de la situation économique à travers des mécanismes rigoureux de suivi et d’évaluation et d’autre part, d’identifier les mesures appropriées en termes d’accompagnement des secteurs impactés.

Les aides allouées à ceux qui vivaient de petits boulots au noir ou de métiers indépendants sans couverture sociale -artisans, journaliers, vendeurs ambulants, coursiers, gardiens, femmes de ménage, ouvriers du bâtiment- vont de 800 à 1.200 dirhams (75 à 110 euros) par mois selon la taille du foyer. Toutes ces aides proviennent d’un fond spécial d’urgence «Covid-19» de plus de 32 milliards de dirhams (2,9 milliards d’euros).

Aucune de ces mesures concrètes n’a été pensées ou élaborées en Algérie par les autorités politiques et publiques. Comme si la survie des salariés et des entreprises algériennes ou même des travailleurs journaliers n’intéresse personne au sommet du pouvoir algérien.

En Egypte, l’Etat a encore fait mieux. Contrairement à l’Algérie qui a totalement abandonné ses entreprises à leur triste sort face aux conséquences économiques de l’épidémie, les autorités égyptiennes ont instruit dés le 19 mai dernier la Banque centrale de fournir 100 milliards de livres, soit plus de 6 milliards de dollars, aux banques sous formes de garanties de prêts pour aider les entreprises à relever les défis économiques imposés par la pandémie du coronavirus.

Ces prêts seront octroyés aux acteurs économiques à un taux de 8%, soit en dessous du directeur de 10,25% actuellement en vigueur. Selon le gouverneur de la Banque centrale égyptienne, Tarek Amer, ce coup de pouce aux entreprises intervient maintenant car celles-ci sont confrontées à « l’augmentation des risques commerciaux sur le marché ».

Au Sénégal, dés le 3 Avril dernier,  l’Etat a mis en place un Programme de résilience économique et sociale afin de renforcer le système de santé du pays, soutenir les ménages, la diaspora, les entreprises et leurs salariés. Le gouvernement sénégalais a sorti l’équivalent de 24 millions d’euros pour le paiement des factures d’électricité de 975 522 ménages. L’Etat sénégalais a pris en charge également les factures d’eau de 670 000 ménages.

Le Sénégal a consacré également l’équivalent de 150 millions d’euros pour l’appui direct des secteurs de l’économie les plus durement touchés par la crise, notamment les transports, l’hôtellerie mais également l’agriculture. De même, en rapport avec le secteur financier, l’Etat sénégalais a mis en place un mécanisme de financement à hauteur de 300 millions d’euros accessible aux entreprises affectées, selon une procédure allégée. Le Sénégal est un pays d’à peine 16 millions d’habitants. Son PIB de 24 milliards de dollars n’équivaut même pas à 20 % des 173 milliards de dollars du PIB de l’Algérie. Et pourtant, c’est le Sénégal qui fait beaucoup pour sa population et ses entreprises alors qu’en Algérie, l’indifférence générale règne en maître au plus haut sommet de l’Etat… Cherchez l’erreur…

 

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