4.9 C
Alger
jeudi, avril 25, 2024

Chaque jour, un militant et internaute emprisonné : l’Algérie d’aujourd’hui est pire que celle de Bouteflika

Triste régression. Inquiétante déchéance. Le 22 février 2019, des millions d’Algériens sont sortis dans les rues de toutes les villes du pays pour dire non au 5e mandat et réclamer le changement politique avec une alternance démocratique et une démocratisation des institutions de leur pays. Une année plus tard, l’Algérie se retrouve prise en otage par un régime encore plus dictatorial, répressif, violant les droits civiques les plus élémentaires de nos concitoyens. Le constat est amer, mais personne ne peut cacher cette vérité : l’Algérie d’aujourd’hui est pire que celle de Bouteflika. 

Chaque jour, oui chaque jour, des militants convoqués par les services de sécurité. D’autres interpellés manu militari. Interrogés, frappés, insultés, humiliés, ils sont ensuite déférés devant les tribunaux qui les placent en détention sans aucune pitié sans respecter le moindre article de la Constitution algérienne.

Prenons quelques exemples. A Ain Témouchent, une jeune appelé Mohamed Latreche a été convoqué dimanche par les services de sécurité pour une enquête à propos d’une caricature sur Tebboune Abdelmadjid qu’il avait publié sur Facebook ! Oui, une enquête pour une image dérisoire sur Tebboune.  La police l’a obligé à signer un PV à la fin de l’interrogatoire. Et la justice risque de convoquer ce jeune internaute dans les jours à venir pour l’inculper officiellement et lui infliger une peine de prison ferme comme ce fut le cas pour de très nombreux militants et activistes du Hirak dont la liste des détenus est chaque jour actualisée par le comité national de libération des détenus (CNLD). Une liste interminable à laquelle les avocats volontaires et valeureux du CNLD rajoutent chaque jour de nouveaux noms. Il s’agit de ces nouveaux militants, internautes incarcérés au nom de l’arbitraire et suivant des accusations totalement farfelues comme « outrage au Président de la République » ou « atteinte à l’unité nationale ». Les publications sur Facebook sont naturellement les seules pièces à conviction présentées pour maquiller « légalement » les incarcérations des militants du Hirak.

Cette nouvelle dictature qui s’instaure en Algérie brise des familles, fait pleurer des mères laissées orphelines par leurs enfants partis se sacrifier dans les prisons algériennes avec l’espoir que leur combat en faveur de la démocratie en Algérie finira par aboutir. Depuis deux jours, toute la toile algérienne est émue et bouleversée par les images de la maman de Malik Riahi et les larmes qu’elle avait versé devant le portail du tribunal de Ain Temouchent où son fils a été condamné à 18 mois de prison ferme pour une vidéo et des publications  sur Facebook. Malik Riahi savait pertinemment qu’il allait être incarcéré à la suite de sa convocation judiciaire. Il n’avait pas fui, il ne s’est pas évadé. Non pas la Harga, il a préféré affronter la bête immonde, celle de ce système totalitaire qui emprisonne à tout toute honte bue. Avant de partir en prison, il avait « légué » aux algériens une vidéo sur les réseaux sociaux où il demande à ses camarades de prendre soin de sa « maman ».

Combien de mamans ont versé des larmes pour leurs fils sacrifiés par le régime algérien ? Combien de mamans se sont lancées dans des cantiques pour maudire ces juges qui emprisonnent leurs enfants sur un simple coup de fil ?

L’Algérie du 22 février 2019 ne s’est pas battue pour se retrouver dans une situation aussi dramatique. Oui, l’Algérie de Bouteflika était corrompue, mal-gérée, frustrante et désespérante. Mais celle d’aujourd’hui est bien pire : elle écrase la faible, le fragile pour permettre au plus fort de s’accaparer de tous les pouvoirs. Sous l’ère Bouteflika, les Algériens ne partaient pas aussi nombreux dans les prisons pour des caricatures dérisoires sur Facebook, des publications ordinaires ou de simples commentaires critiques à l’égard du régime. Reconnaître cette vérité est essentielle pour comprendre l’actuelle profondeur de la régression politique de notre pays.

Les Algériens, et les Algériennes, ne vont pas se taire. Ils ne céderont pas à ces intimidations quotidiennes. Demain, lorsque la crise sanitaire du coronavirus COVID-19 sera derrière nous, les rues du pays vont s’embraser de nouveau. La dictature algérienne n’a donc pas encore gagné le match. L’arbitre n’a pas sifflé la fin de la partie. C’est notre dernier espoir…

dernières nouvelles
Actualités